La Cabane de la Glace
Mardi 13 septembre, après plusieurs heures de marche, j’arrive auprès de celle qui m’assurera protection contre vent et pluie. Nichée à environ 2500 mètres d’altitude, elle n’est que peu fréquentée. Absente des cartes, aucun chemin n’y mène. Toit et murs sont en pierre, aucun ciment. Ses murs sont parfaitement droits. A quels illustres inconnus doit-on cette incroyable construction ? Aucune idée ; mais elle est surprenante et ne laisse aucun de ses rares visiteurs indifférent. Dissimulé dans ses murs, un petit carnet dans lequel chacun met un mot. On y lit les mots « magique », « merveilleux », « idyllique », et bien d’autres. Fondue dans cet univers rude, tantôt glacial, tantôt brulant, cette cabane, parfaitement mimétique, est une rencontre fascinante pour celui qui la découvre.
Les quelques rares fleurs que l’on trouve encore dans le secteur à cette période de l’année sont les Saxifrages paniculées (Saxifraga paniculata) et la Campanule fluette (Campanula cochleariifolia). Ce secteur est parfois parcouru par le Gypaète barbu ; mais il restera discret durant cette journée.
Au matin du 14 septembre, la visibilité est des plus médiocre. On ne voit pas à 20 mètres. Me trouvant sur une arête, la prudence est de mise. Je passe alors une partie de la matinée à observer le soleil et le brouillard se disputer la place. Parfois le soleil perce le voile gris en profondeur, donnant alors des reflets métalliques aux roches humides. En contrebas, l’étrange chant des Perdrix des neiges se fait entendre. Les conditions n’allant pas en s’améliorant, exclu de céder au chant des sirènes.
Début d’après-midi, le soleil remporte la partie ; les Lagopèdes se sont tus. Profitant encore quelques instants du panorama, j’entame la descente. A peine 200 mètres plus bas, un couple de Lagopèdes alpin se laisse observer. Leur plumage est parfaitement mimétique, leurs mouvements sont lents, sans saccades.
A la manière de cette surprenante cabane, difficile de les repérer dans cet univers minéral ; mais quand par chance notre regard croise cette harmonie, c’est du pur bonheur.